«Pour me rassurer pendant que ma mère est suspendue par les cheveux au chapiteau, ma soeur me raconta le “conte de l’enfant que l’on fait cuire dans la polenta ». Si je me représente l’enfant en train de cuire dans la polenta, et comme il a mal, je ne suis pas obligé de penser que ma mère pourrait tomber de là-haut.»
Entêtant monologue où la narratrice, cadette d’une famille d’artistes de cirque qui a fui la dictature roumaine pour sillonner l’Europe, tente de conjurer ses peurs d’enfant puis d’adolescente: peur que l’extravagant numéro de sa mère ne finisse mal, peur «d’ouvrir la porte de la caravane et que chez nous s’évapore dans des pays qui sont tous à l’étranger», de la solitude dans un pensionnat, de la folie qui a déjà pris la demi-soeur «parce que le père l’aime comme une femme». Drôle, absurde, mélancolique, tragique dans sa légèreté même, ce récit évoque une descente aux enfers où de l’innocence enfantine ne subsistent que quelques traits d’humour, une langue directe, traversée d’éclairs poétiques, et par dessus tout le désir de vivre.
Aglaja Veteranyi est née en 1962 à Bucarest dans une famille d’artistes de cirque. Elle apparaît dans des numéros avec son père dès 1965. En 1967, la famille fuit la Roumanie et s’établit à Zurich. Dès 1979, elle entreprend une formation de comédienne et commence à écrire. Aglaja Veteranyi s’est donné la mort le 3 février 2002 à Zurich.
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