Agapé. Née de tout et née de rien (1982)

Présentation

Les lecteurs et lectrices de Femmes Suisses connaissent déjà Agapé qui fut interviewée, en juillet 1981, pour son premier livre Tu crois que demain… Dès la première page de son dernier ouvrage, Née de tout et née de rien, Agapé nous donne le ton : l’écriture s’impose telle la faim, elle est affaire d’existence : « Les mains dansent sur le clavier, s’arrêtent essoufflées pour essuyer une colère ou une larme, s’arrêtent pour un cri, pour un appel, non Agapé n’est pas là, Agapé écrit, laissez-là, laissez-moi quoi repas, lessive, vaisselle, ménage, enfants, mari Est-ce qu’on ne me laissera donc jamais seule? Est-ce que femme, je ne me sentirai jamais le droit de m’arrêter pour moi, SILENCE, laissez-moi, c’est une affaire entre mon âme et moi, c’est une affaire d’existence… J’écrirai jusqu’à la fin de ma faim et s’il faut m’y user les doigts, j’écrirai avec les dents. » Revient douloureusement l’évocation de la mère avec cris de rage et cris d’amour : « J’en peux plus ma mère et j’ai beau hurler tantôt « salope » et tantôt te crier mon amour, il ne reste toujours que cet éternel silence et tes yeux qui se détournent comme avant, comme quand j’était petite et que tu me laissais partir sans jamais te retourner, sans jamais me retenir ». Agapé a mal à son enfance ratée, de ce mal qui ne guérit pas malgré la volonté d’en finir une bonne fois. Et cette souffrance donne la main à toutes les souffrances d’enfant : « Partout des mères qui tiennent des petits au ventre trop gros, aux yeux trop grands… Contre le mur une photo pour ne pas oublier, pour ne pas s’endormir, un enfant, un tout petit enfant qui tient juste dans le creux du bras et qui n’en finit pas de mourir… ».
En criant sa propre souffrance. Agapé hurle celle des autres aussi, celle qu’engendrent la faim et la guerre. Et de tous ces cris que l’écriture libère, naît avec le printemps le bonheur « Le printemps est chez moi, je lui avait dit « Entre et assieds-toi, je te donnerai… mille soleils toute bougies allumées comme pour un Noël… » et je ramasse de grandes brassées de fleurs ou de feuillages et j’ai teint mes rideaux dans de vieux draps, j’ai peint, cousu, brodé des choses qui n’avaient pas d’âme pour les réchauffer et alors, j’ai défait mes valises et me suis installée dans ma Maison. »
Ch. Matin Reymond (Femmes suisses et le Mouvement féministe)

Auteure

Agapé est paysanne de haute montagne (dans les Alpes vaudoises), mère de famille, graveur, écrivain.

1982 | 13 x 20 | broché | 130 p.
ISBN 978-2-8290-0029-3
Titre épuisé